EN BREF |
Les maladies des chaînes lourdes sont des syndromes lymphoprolifératifs B rares caractérisés par la production d’une protéine monoclonale (M) constituée d’un fragment de la chaîne lourde de l’immunoglobuline sans chaîne légère associée. La chaîne lourde est souvent incomplète ou tronquée ; le pic monoclonal à l’électrophorèse peut être alors absent dans certains cas.
Dans la plupart des dysglobulinémies plasmocytaires, les protéines M ont une structure semblable aux molécules normales d’Ac. En revanche, dans les maladies des chaînes lourdes, il y a production d’Ig monoclonales incomplètes (paraprotéines vraies). Les lymphocytes ou les plasmocytes anormaux sécrètent les différents types de chaînes lourdes (alpha, gamma, miu, ou delta) sans chaînes légères. (On n’a pas encore observé de maladie des chaînes lourdes epsilon e). La plupart des protéines des chaînes lourdes sont des fragments de leurs homologues normaux avec des délétions internes de longueur variable ; ces délétions semblent résulter de mutations structurales. Le tableau clinique est plus proche de celui d’un lymphome que d’un myélome multiple.
On distingue 3 types de maladies des chaînes lourdes selon la classe de chaîne lourde d’Ig produite par les cellules clonales : alpha, gamma, mu.
- Maladie des chaînes lourdes alpha : forme de lymphome de MALT appelé également maladie immunoproliférative de l’intestin grêle (ImmunoProliferative Small Intestinal Disease : IPSID), lymphome méditerranéen ou maladie de Seligmann
- Maladie des chaînes lourdes gamma (Maladie de Franklin) associé typiquement à un lymphome systémique souvent de type lympho-plasmocytaire mixte
- Maladie des chaînes lourdes mu dont la clinique rappelle un lymphome lymphocytique ou leucémie lymphoïde chronique avec néanmoins au niveau médullaire des cellules distinctives vacuolisées lymphocytaires/plasmocytaires
Le pronostic de ces maladies est variable et le traitement n’est pas standardisé sauf pour les IPSID qui peuvent répondent à un stade précoce à un traitement antibiotique.
Diagnostic des maladies des chaînes lourdes
Circonstances diagnostiques :
- prise en charge d’un lymphome
- évaluation d’un composant monoclonal dans le sérum, les urines ou tissulaire
Le diagnostic des maladies des chaînes lourdes et celui du syndrome lymphoprolifératif sous-jacent passe par l’analyse histologique des tissus atteints et l’analyse du sérum ou des urines.
L’histologie couplée aux immunomarquages montrera une population monoclonale positive pour une chaîne lourde mais négative pour les deux chaînes légères kappa et lambda.
La mise en évidence du pic monoclonal est de fréquence variable et dépend du type de maladies des chaînes lourdes. Si la protéine anormale est présente à l’immunofixation, elle est constituée d’une chaîne lourde (alpha/gamma/mu) sans être associée à une chaîne légère.
Type de maladie | Pic monoclonal ? | Aspect de l’électrophorèse |
Alpha | Non | 50% normale
50% aspect de large bande dans les alpha2 et betaglobulines NB : la protéine anormale peut être absente du sérum |
Gamma | Non >> Oui | Plutôt tracé large et hétérogène plutôt qu’une bande localisée |
Mu | Non > Oui (40%) | panhypogammaglobulinémie (bande localisée 40%) |
Physiopathologie
L’immunoglobuline normale est composée de deux chaînes lourdes et de deux chaînes légères reliées entre elles par des ponts disulfure. La fixation des chaînes légères se fait au niveau d’un des domaines de la région constante de la chaîne lourde (CH region) : CH1. En l’absence de chaîne légère, le domaine CH1 se fixe à la protéine de choc thermique 78 (Heat Shock Protein 78) également appelée BiP pour Binding Protein et est dégradée au niveau du protéasome au lieu d’être sécrétée.
Dans les maladies des chaînes lourdes, des délétions non contiguës dans la région CH1 empêche la fixation de la chaîne lourde anormale à la chaîne légère ainsi qu’à la protéine de choc thermique 78 empêchant sa dégradation. Les chaînes légères sont alors sécrétées dans le plasma (ou dans le fluide jejunal pour la maladie des chaînes lourdes alpha) et si le fragment est assez petit dans les urines.